Bonjour à toi ami lecteur. On a coutume de dire que le malheur des uns
fait le bonheur des autres. Un petit adage particulièrement vrai lorsque
lesdits malheurs échoient à ce XV de la rose que nous sommes nombreux à aimer
détester.
Nous Français, bien sûr, hardis coqs cocardiers et ayant en mémoire les
leçons apprises sur les bancs de l’école… Enfin de celles d’avant… D’avant les
666 réformes des programmes… Mais ceci est une autre histoire… Les leçons
d’histoires donc et autant de nom qui résonnent comme des appels à la
revanche : Azincourt, Crécy, et tant d’autres. Epiques batailles que l’on
nous contaient alors avec moult effets de style pour nous dire comme quoi nos
braves chevaliers Français, plein d’honneur et de panache, s’en étaient allés
se faire étriper par de vils Anglois prêts à toutes les bassesses pour
l’emporter. A commencer par prendre place sur une hauteur pour laisser à leurs
archers, Gallois ceux-là, le soin de gagner la bataille. Personnellement,
lorsque l’on m’évoquait la chose, j’avais plutôt tendance à trouver que nos
chevaliers étaient des pauvres cons pour s’en aller charger sabre au clair sans
plan, ni raison (toute ressemblance avec une certaine équipe…) et, au
contraire, les Anglais plutôt ingénieux pour se gagner des batailles sans coup
férir. Ceci dit, il me faut confesser que si depuis la nuit de mes temps
rugbystiques, les terrains du tournoi des 6 nations ont bien souvent reproduit
l’histoire, le panache de nos joueurs m’étaient alors plutôt sympathique quand
le pragmatisme de notre meilleur ennemi avait lui plutôt tendance à me faire
tartir.
Il faut dire que le lyrisme des commentateurs, et la prose avenante de
quelques grands conteurs des épopées ovaliennes, parvenaient encore à me faire
accroire qu’il pouvait y avoir de l’honneur dans la défaite, pourvu que l’on y ait
mis du cœur, ce qui certes peut s’envisager, mais pire, les bougres m’avaient
convaincu que triompher petitement, sans gloire et sans panache n’était en
somme qu’une sorte de défaite qui n’en avait pas le nom… Les cons, là encore.
Après quelques années de pratique, à mon fort modeste niveau, sur les
nombreux terrains pelés de nos provinces, je dois bien admettre que seule la
victoire est belle, et que, la certitude d’avoir tout donné, n’est qu’un baume
de peu d’effet sur les blessures de la défaite. Que, si l’on gagne sans que la
balle ne dépasse jamais les mains du premier centre, en pratiquant jusqu’à
l’écœurement la théorie des petits tas du regretté Thierry Gilardi, en
préférant la percussion blindée aux arabesques chaloupée, etc, qu’importe…
Qu’importe la manière, seule la victoire est belle pour celui qui la cueille,
et par là même, plus elle est irritante pour qui la subit.
Et en l’espèce, force nous est de reconnaître que, face au XV de la
perfide (tu comprends mieux pourquoi le terme maintenant, je suppose) Albion,
nous bûmes plus souvent de vinaigre que de nectar. Nectar qui n’était d’ailleurs
sans doute que meilleur lorsque d’aventure l’on pouvait y gouter. Et nous ne
sommes pas les seuls. Quiconque se passionne pour la plus belle compétition qui
soit, ce bon vieux tournoi tant aimé, sait que l’Angleterre cristallise la
vindicte de toutes les autres nations et que, hormis la victoire de sa propre
équipe, rien n’est plus plaisant aux cœur Gallois, Irlandais, Ecossais,
Français, et dans une moindre mesure (mais ça viendra avec le temps) Italiens,
que de voir les ‘sbeefs se prendre les pieds dans le tapis.
Alors oui, en ce lendemain de vautrade majuscule, dans la certes bien
nommée « poule de la mort », il est difficile de ne pas afficher un
petit sourire satisfait. C’est au moins ça de gagner en attendant que nos bleus
parviennent enfin à nous procurer un peu de plaisir… Comment ? Qu’est-ce
que tu dis ? Jusqu’ici ils gagnent !... Benh oui… En fait t’as
raison… Alors joies et félicitées, paix sur la terre et tutti quanti…