vendredi 21 octobre 2011

Faut être logique !


Depuis hier, la neige tombe en abondance sur les rives du Léman comme si mon divin ami voulait jeter un voile pudique sur les récents errements communautaires de mes hôtes Helvètes. Certes les cantons francophones se sont illustrés par leur farouche rejet des élucubrations de l’UDC, mais la fédération dans son ensemble a approuvé ses lois iniques. Cela montre toutes les limites de cette démocratie directe que certain(e)s ahuri(e)s voudraient voir adopter en France… Si tous les électeurs disposaient de la capacité nécessaire à l’exercice d’un bon jugement…Cela se saurait… Et il ne faut donc pas s’étonner que de telles votations imbéciles produisent des résultats qui le sont encore plus… Faut être logique!
 
Mais tel n’était pas mon propos en venant ici… Parce qu’au détour de mes lectures sur divers blogs, j’ai cru voir passer certains échanges revenant sur le bon (ou mauvais) usage de la Marseillaise sur les terrains de sports.
Et ça me fait marrer de lire tous les tenants d’un patriotisme de mes belles deux nous livrer leurs théories hallucinantes sur la corrélation entre les performances de nos sportifs et le fait qu’ils aient chanté ou non la Marseillaise… Mais ça, j’y reviendrai un autre jour… Pour l’heure, c’est plus l’Hymne lui-même que je voulais évoquer et surtout ce qu’il est par opposition à ce que certains décalcifiés du bulbe voudraient en faire…
En prenant soin de commencer par affirmer qu’un hymne national à tout prendre qu’est-ce ? Une musique certes ! Des paroles souvent ! Mais, faut être logique: c’est surtout un symbole.
 
Parce déjà le texte, les paroles, par exemple… Benh faut pas non plus trop y attacher d’importance… Je veux dire, imaginons que je me mette à entonner les célèbres couplets… Cela ne voudrait pas dire pour autant que j’attende avec impatience un quelconque jour de gloire, où que je craigne quelque étendard tout sanglant qu’il fut.
Ma campagne résonne plus des cloches des vaches helvétiques que des mugissements de soldats…De soldats féroces qui plus est !
Je n’ouvre mes bras qu’à mes ami(e)s et ils sont terminés (mes bras, pas mes amis) par des protubérances cartilagineuses susceptibles de faire entendre raison à tout apprenti égorgeur.
Je n’ai point gout pour les armes et encore moins pour marcher au pas cadencé de quelques bataillons que ce soit. Pas plus que je n’ai de disposition agraire me laissant supposer que le sang puisse être un engrais efficace…
Autant dire que ce ne sont pas les mots eux-mêmes qui m’entrainent à pousser la chansonnette de ma voix mâle et altière. Tu mords la Logique du truc ?
D’ailleurs, la polémique récurrente sur les paroles même de la Marseillaise me fait souvent sourire. Oh certes elles sont un brin martiales et quelques peu violentes mais là n’est point le sujet puisque c’est avant tout un contexte historique qui a prévalu au choix de cette chanson pour hymne national de notre belle France.
Parce que, faut être logique: si un certain Général avait entonné « La Digue du Cul » plutôt que le « Chant de Guerre pour l’Armée du Rhin » lors du rassemblement des volontaires du midi par un beau jour de juin 1792, notre hymne aurait été certes un brin plus primesautier mais, avouons-le, un tantinet moins présentable. Et pourtant, pourquoi le taire, si ledit Général avait eu cette lumineuse idée, c’est bien cette gaillarde chanson évoquant les quelques péripéties émaillant un périple entre Nantes et Montaigu, qui serait aujourd’hui notre hymne.

De même pour la musique, quel que soit son compositeur, de Rouget de Lisle à Playel, ou quelle qu’en soit sa valeur harmonique, ni l’un ni l’autre ne furent la raison principale du choix de cette ritournelle comme hymne national.
Personnellement d’ailleurs je ne trouve pas que l’œuvre musicale en elle-même soit mémorable, manquant singulièrement de variations rythmiques et autres complexités harmoniques de bon aloi…Tout au plus a t'elle le mérite de sonner agréablement lorsque, reprise en chœur par de vaillantes poitrines, elle résonne dans les stades du monde entier. Parce que, faut être logique, c’est sans doute plus un chant fait pour être repris à l’unisson par une foule en délire qu’une musique savamment orchestrée que l’on écoute au casque en savourant un délicieux Porto.
 
Bref, le contexte, plutôt que les paroles ou la musique présidèrent donc au choix de la Marseillaise et ainsi le morceau n’est-il sans doute pas pire qu’un autre pour symboliser notre vaillante patrie.
Si on y réfléchit d’ailleurs il est amusant de voir que les détracteurs de la Marseillaise lui reprochent des paroles jugées trop violentes se basant sur leur unique connaissance du premier couplet, auquel on résume certes très souvent l’ensemble de l’œuvre. Je les invites cependant à lire le reste des couplets et particulièrement le cinquième qui atténue immédiatement l’ensemble des volontés guerrières affichées en ouverture.
Mais encore une fois les paroles ne sont pas le plus important. Le contexte l’est beaucoup plus. Tiens, à tous les hemoimpurophobes, je pose cette question un brin provocatrice : que penseraient-ils de remplacer les paroles honnies et l’hymne lui-même par un « Maréchal nous voilà » aux paroles autrement plus pacifiques…Hein ?
Levée de bouclier en perspective, preuve s’il en fallait une que le contexte est bien le plus important.

Ainsi, il convient d’être logique et de ne voir en la Marseillaise que la simple et nécessaire célébration d’une révolution qui, comme je l’ai déjà dit (et d’autres avants moi que les initiés reconnaitront), n’a peut-être pas éliminé la misère et l’exploitation mais a sans doute contribué à les réduire. Une révolution bourgeoise plus que populaire et une révolution, somme toute plus efficace que celles qui suivirent…Une révolution qu’il n’est donc pas forcément déplacé de vouloir célébrer… Fut-ce au travers d’un Hymne National…