mercredi 19 décembre 2012

Faut-il tuer les petits garçons qui marchent dans la mer ?


Bonjour ami lecteur. Tu te rappelles sans doute, malgré ta mémoire de bulot, de mon excellent article, sobrement intitulé Buffalo Bide, dans lequel je te contais mon Amérique à moi. Tu te souviens donc qu’entre autres considérations toutes plus pertinentes les unes que les autres je te disais mon admiration pour quelques enfants de ce charmant pays… Tu vois de quoi je parle ? Non ? Tant pis… Bref, il y a déjà quelques années, j’avais pondu un petit texte pour rendre hommage à un petit gars que j’aime énormément… Et comme je t’aime bien, je te le restitue ici après l’avoir un peu retravaillé… Allez suis-moi… Je t’emmène en voyage…

Pour commencer, une plage… Une plage américaine avec sa promenade en bois et un sable doré que viennent caresser les vagues de l’Atlantique… East Coast donc… C’est bon ? Tu mords le tableau malgré ton imagination en déshérence ? Oui… Alors on continue…
Sur la plage, un homme est assis, un carnet sur les genoux, il écrit... D’une écriture hâtive, presque nerveuse, il noircit du papier… Il n’en est qu’au début du roman mais il sait déjà qu’il s’apprête à mettre deux/trois coups de pieds dans les burnes de ces abrutis bronzés de Californie qui inlassablement lui retournent ses scenarii comme autant de fins de non-recevoir…
De son roman en gestation, il connait aussi le titre… Un titre puisé dans ses souvenirs d’outre-atlantique quand il s’ennuyait ferme sur les bancs d’une Sorbonne qui n’avait pas encore hissé le drapeau rouge, ni commencé à dépaver la moitié de paris… The Deer Park… Que ça va s’appeler… et ça va faire mal…
A un moment donné, il relève la tête pour reposer son poignet endolori… Il regarde la mer…
Le flux et le reflux qui viennent presque baigner les pieds d’une jeune femme… Prêt de la femme : un enfant qui joue… Juste un enfant comme tous les autres sur toutes les autres plages du monde et de son immédiate périphérie… Un enfant avec sa pelle et son seau…
L’enfant relève soudain la tête à son tour et leurs regards se croisent… Mailer sourit… L’Enfant lui répond en faisant de même… Mailer lève la main et lui adresse un petit salut… L’enfant lui répond encore… La femme se retourne et regarde avec un brin de défiance cet homme dans la trentaine qui contemple son fils avec un air un peu bizarre… Imperceptiblement elle se rapproche du gamin… La louve en action… Prête à mordre qui en veut à sa progéniture… Alors Mailer baisse les yeux et revient à son ouvrage.
Il relit ce qu’il vient d’écrire… C’est du tout bon… Ce sera son troisième bouquin et il espère bien que ce sera le début du commencement d’un certain succès… Pas qu’il soit vaniteux, mais il a des choses à dire et il aimerait qu’elles ne tombent pas toutes dans l’oubli dans les arrières boutiques crasseuses de librairies encore plus miteuses… Ca bouillonne de partout sous sa calbombe et si il ne laisse pas s’échapper un peu de ses idées tempétueuses,  il va se faire péter une durite ou un truc du genre mais en pire…
Une ombre se profile au-dessus de lui… Petite… courtaude… Agitée… Il lève les yeux… C’est le gamin… La mère est juste derrière… Un peu anxieuse… Elle pose sa main sur l’épaule du gosse… Doit avoir dans les 4 ou 5 ans le minot…
-          Tu fais quoi M’sieur…
Demande le gosse avec cet accent caquetant du New Jersey qui fait que Mailer ne peut s’empêcher de superposer l’image de Donald Duck à celle du gamin en Bermuda et tee-shirt blanc.
Mailer, sourit de nouveau :
-          J’écris…
-          T’écris quoi ?
-          Un livre…
-          Ça parle de quoi ?
Là Mailer se sent un peu dans la merde étant entendu que le sujet de son livre ne saurait se discuter avec un enfant de cet âge… Surtout pas avec la mère juste derrière que même si elle parait s’être radoucit n’en continue pas moins de lui jeter des regards suspicieux… Encore moins dans ce début des années cinquante encore très puritaines dans cette Amérique d’après-guerre…
-          Heu… De moi… Un peu… De la Californie aussi… Tu connais ?
-          Non – répond le gosse en se grattant les couilles à travers le tissu épais de son bermuda – J’peux voir ce que tu écris ?
Mailer commence à paniquer un brin… Alors il tente le coup de poker :
-          Tu sais lire ?
Le visage du môme s’illumine. Il se retourne vers sa mère et se met à farfouiller dans le grand sac de plage que la femme porte à son bras droit. Il en extirpe un livre pour enfant en piteux état… Un de ces bouquins présentant chaque lettre de l’alphabet avec un mot qui lui est associé… Le petit l’ouvre au hasard.
-          « C »… Cat… - claironne-t-il fièrement…
Mailer hoche la tête.
-          C’est bien…
-          « D »… Dog… « E »… Elephant… « F »… Fox…
Mailer lève la main.
-          C’est bon… C’est bon tu sais lire… Je te félicite…
Le gamin tend alors une main preste vers le cahier que Mailer a posé à côté de lui pour s’adresser au gosse.
-          Alors tu me donnes ton livre ?
-          Bruce chéri – Intervient la mère – Laisse le Monsieur tranquille… Il faut y aller…
« Oh pitié oui… » Pense Mailer…
-          Mais je veux le livre du Monsieur – Insiste le garnement.
Mailler pose une main protectrice sur le précieux cahier lorsque soudain lui vient une idée. Il se penche vers le sac à dos posé à ses pieds et en extirpe un livre au format poche… Un ouvrage qui semble avoir vécu une belle vie de livre lu et relu… Couverture écornée et quelques feuillets tout prêts à se faire la malle à la première seconde d’inattention du propriétaire… Mailler tends le livre à l’enfant :
-          Tiens… Prends celui-là… Il est mieux…
Bien sûr, c’est la mère qui prend le livre et le regarde… « Les Raisins de la Colère »… Elle s’apprête à le rendre à l’homme mais le petit est plus prompt et se saisit du bouquin… Il le feuillète rapidement puis avec une moue un peu dégoutée lâche :
-          C’est nul… Y’a pas d’images…
-          Bruce ! Tance la mère…
Mailer lève la main en signe d’apaisement…  L’enfant fait de nouveau tourner les pages rapidement puis demande :
-          C’est toi qui l’as écrit Monsieur ?
Mailer sourit… Il aimerait bien… C’est sûr… Putain oui…
-          Non… C’est un autre Monsieur…
-          Ah – se contente de dire l’enfant…
La mère se baisse pour se mettre à hauteur de son fils.
-          Allez rend le livre au Monsieur… Tu as vu… C’est un livre pour les grands…
Le gosse sert le livre sur son cœur et toise sa mère avec défi :
-          Non ! Je le garde… Je le lirai quand je s’rais grand !
La mère se tourne vers Mailer…
-          Je suis désolée… Je…
-          Ce n’est rien… Il peut le garder… Il le lira plus tard comme il l’a dit… C’est un bon livre… Un très bon livre…
La femme hoche la tête. Elle se relève puis prend la main de son fils…
-          Allez… On doit y aller maintenant…
Elle fait un pas de côté puis commence à partir en direction du petit escalier qui remonte vers la promenade. Le petit la suit…
Mailer les regarde s’éloigner… Il s’apprête à tourner la tête pour revenir à son roman lorsque le gamin l’interpelle :
-          Hey M’sieur… Comment tu t’appelles ?
-          Norman… et toi c’est Bruce… C’est ça ?
-          Oui… R’voir M’sieur…
-          Au revoir petit…
L’enfant repart, tracté par sa mère qui accélère le pas. Alors Mailer reporte son regard vers l’Océan… Et les vagues qui inlassablement ballaient ce petit bout d’Amérique… Cette plage de Long Branch aux confins du New Jersey…

lundi 10 décembre 2012

Tarte à la Crême Story.


Bonjour ami lecteur, ce week-end, il a neigé sur le Lac, sur ma maison, sur la plaine… Mais je te rassure… Je ne vais pas te causer des souvenirs de toi ni de mes jours de peine qui reviennent ou je ne sais plus quelle mièvrerie…

Si j’avais l’humeur versificatrice, j’écrirais comme quoi la nature frigorifiée a revêtu son blanc manteau, t’évoquerais du cotonneux, du scintillant… et autres émerveillements…
Je te dirais l’étincelle dans les yeux des enfants et leurs jeux innocents dans la pureté virginale de la campagne vaudoise… Je te ferrais ouïr leurs cris de joie par la seule force de ma plume alerte…
Je te parlerais de mes montagnes encore plus belles avec leur robe blanche, celles qu’on réserve d’habitude pour les beaux dimanches… ou pour les mariages pas gais… les épousailles en bichromie… avec la mariée en blanc qui veut faire croire qu’elle a toujours son berlingue et le condamné en noir pour mieux porter le deuil de sa liberté envolée.

Je pourrais aussi, t’évoquer le côté pratique de la chose. Te dire comme quoi ces chutes précoces sont bienvenues pour lancer la saison de ski… Te raconter que j’ai sorti mes Kastle de leur housse pour une petite séance de fartage pré-saison de bon aloi… Sauf que mes skis sont encore dans le placard de notre appart’ Mauriennais et que j’ai l’habitude d’en confier l’entretien à un préparateur beaucoup plus doué que moi en la matière…  Mais il n’en reste pas moins vrai que je vois toujours avec une joie ineffable, les premières neiges poudrer les cimes… L’œil rivé sur les sommets Alpins dès les premiers frimas le Ytse… En appeler à mon ami divin… qu’il joue pas au con avec son réchauffement de mes belles deux… Neige, Neige, Neige…sur les pentes… Puis du froid bien glacial pour que la sous-couche se forme…

Bref, je pourrais crier hip,hip,hip houra comme celui qui, de sa mansarde, regardais une fameuse hécatombe… Te dire combien je suis heureux de ce don du ciel… Je te tirerais des larmes malgré ton cœur de pierre…. Te peindrais tant tellement bien les beautés soyeuses de ces paysages hivernaux que peut-être même tu t’empresserais de venir voir par toi-même si je te conte fidèlement la réalité ou si j’exagère, porté par je ne sais quel élan poétique…
Et rien que cette perspective aurait tendance à m’inciter à laisser mes rimes dans le réservoir de mon Meisterstuck… Vu que je ne goute rien tant que la tranquillité de ma Campagne Vaudoise… Pas question de me voir envahi par des touristes kodakeux venus blanchir de la pellicule en immortalisant les sommets Alpestres et Jurassiens dans leur costume immaculé…
Ou pire, tu préparerais toi aussi tes lattes pour t’en venir skier sur MES massifs, massacrer MES pistes, abimer MES paysages. Perspectives ô combien rédhibitoires… Je te hais rien que d’y penser…

Mais surtout… et aussi… Pour dire le vrai… La neige me gonfle…
Déjà, elle m’a valu un réveil matinal Samedi avec quelques propos sibyllins de Madame… Propos qui, bien que formulés en termes choisis et élégants, n’en étaient pas moins clairs sur le fait que ma chère et tendre entendait bien me voir m’activer urgemment afin que de déneiger notre cour… et que le temps qu’elle tendait à m’accorder pour se faire approchait dangereusement de sa date de péremption.
Et voilà donc votre Ytse qui s’en va, dans le vent et la froidure, pelle sur l’épaule et chapka sur la tête, lutter contre les éléments pour tracer à sa douce un chemin vers les joies des shoppings sabaticaux autant que dispendieux…
D’ailleurs… Y’avait pas que moi… Quelques malheureux voisins étaient là aussi à pelleter cette neige collante et lourde…
A tout le moins, ses chutes intempestives nous donnent-elles aussi l’occasion de quelques virils échanges, entre hommes de bonne compagnie, sur les caprices de la météo et ceux de nos conjointes…

Une bonne heure plus tard, après m’être bien gelé les couilles et le reste… Je regagnais mon chez moi, la tête pleine de doux rêves qui me parlaient de bon bains chauds, mousseux et odorants… et comme je ne te cache rien, ami lecteur, j’ajouterai que mon esprit vagabonds complétait ce tableau déjà bien engageant de quelques scénarii sympathiques dans lesquelles ma bien aimée profitait de mes ablution pour exprimer sa reconnaissance envers son mâle épuisé par un dur labeur…
Malheureusement la belle avait d’autres idées en tête… A commencer par celle de remplir le réfrigérateur…
Et donc, après moult négociations, mon bain se mua en simple douche… Le repos du guerrier mon cul…

Bref, tu as compris que cette neige soudaine ne m’a pas fait rire au fond… La neige, en montagne… là où une certaine déclivité permet de profiter de l’ivresse des grands espaces et des traces tirées dans les étendues virginales et impratiquées… Mais pas chez moi…
Pas en plaine… Pas dans ma cour…
Dans mon jardin… Eventuellement, je veux bien… C’est joli et ça justifie le retrait de la tondeuse dans la remise d’où j’aimerais ne plus la sortir… Dans les champs environnants aussi et pour les mêmes motifs esthétiques… Mais pas plus…
Au fond, la neige, c’est un peu comme l’histoire de la tarte à la crème… Ça ne te fait pas rire quand c’est toi qui la prends dans la gueule…

jeudi 6 décembre 2012

Meurs pas, on a du Monde.


Bonjour ami lecteur. J’entends dire ici ou là que la fin du monde est proche, une poignée de jours et hop… La fin des haricots et de l’humanité.

Tout ça parce qu’une bande d’allumés à plume nous racontent comme quoi on est actuellement dans le quatrième monde et que le 21 Décembre de l’an de grâce 2012…  Terminado… On passe dans le 5ème… Une histoire de baktun… De treizième baktun en plus…
Bon, pour dire le vrai, je n’ai jamais lu le Popol Vuh personnellement. D’ailleurs, ce terme un brin ésotérique, a longtemps été pour moi le nom d’un groupe Allemand… Par ailleurs compositeur de la musique de l’excellent Aguirre, La Colère de Dieu… Ce qui boucle un peu la boucle avec les Mayas…
Bref et donc, le Popol Vuh… Dont il faut d’abord savoir que ce qu’on en connait… C’est une version tout ce qu’il y a de plus apocryphe… Copie de Copie de Copie d’un texte pas du tout original… Un peu comme notre bible ou nos évangiles… Tout aussi crédible…
D’ailleurs, on peut remarquer, s’en étonner ou même s’en émerveiller, mais dans sa structure et son contenu, le texte en question comporte quelques similitudes troublantes avec notre bible… De quoi s’interroger sur l’interprétation que ce brave Ximenez a pu faire de la mythologie Maya…
Ce qui devrait nous amener à nous demander si le supposé contenu eschatologique dudit livre ne serait pas le fruit de l’ajout d’éléments de notre propre culture à la cosmologie précolombienne…
Mais admettons… Donc le 21 Décembre… Fin du 12ème bidule… on entre dans le 13ème… La date devient 13.0.0.0.0 dans le calendrier Maya… Et c’est tout… Nulle indication comme quoi que, au soir du 12.20.20.18.20, au douzième coup de minuit…
Interprétation encore, interprétation toujours…
Surtout, on glose, on glose mais on ne sait pas de quoi on parle… Faudrait demander aux Mayas… Mais on les a un tantinet exterminés… Tout au moins leur culture, leur historiographie, leurs traditions… Poum… Tous Christianisés à grand coup de pompe dans le dargif… La croix tu te la mets au cou ou on la pose sur ton bide avec 2 mètres de terre pour faire bonne mesure…
Alors maintenant … On n’a pas l’air con avec cette pseudo-menace au-dessus de nos têtes et personne pour nous dire si oui ou merde… Fallait y penser avant… Avant de les tous tuer en pensant que le gars là-haut il reconnaitrait les siens…

Tiens, rien qu’à y penser et à tous les autres qui furent massacrés dans la joie et l’allégresse afin que de sauver leurs âmes damnées de bons sauvages… Benh je me dis qu’une bonne apocalypse… Ça ne pourrait pas faire de mal… Je ne dis pas que je le souhaite… hein ? Qu’après y’a des fâcheux qui vont venir me crier contre comme quoi je suis ceci ou cela… Mais bon… Je me dis que si jamais… si d’aventure… Le 21 Décembre marquait la fin de tout… Benh ce ne serait pas si grave.
Je veux dire… On manquerait à qui ?
Parce que si mon ami Divin, à qui on les brise quand même bien menues… faut admettre… Donc, s’il dit merde à tout et nous envoie tous valser dans les confins histoire de nous montrer qui s’est qui commande… Benh… Voilà quoi… On sera plus là pour en parler et pleurer sur notre sort… Se dire que si on avait su on aurait agi moins connement… Qu’on ne sait même pas si ça aurait changé quelque chose à l’affaire d’ailleurs…
Poum… Le grand coup de torchon unique et irrévocable… On passe du tout au rien… Le grand, le beau rien… Le calme… Même plus un chant d’oiseau que c’est certes beau mais que ça casse quand même bien les couilles à 4h du matin… Le putain de Silence… Le rêve…

Attention… Je ne dis pas que je voudrais voir ça… Etre le seul survivant, ou avec une poignée d’autres… Que non… Surtout pas… Si tout doit disparaitre, je veux partir avec… Que des fois, pour me faire une blague, mon pote me laisse tout seul avec quelques cons… L’éternité deviendrait cauchemar… Il en est capable le bougre… T’imagine… Le 22 au matin… Je me réveille… Y’a plus personne sauf les cons que je te cause dans mes petits papiers… Les phobeux de tout poil… L’horreur…
Mais pas de ça Lisette… Je vous en prie mon Dieu… J’ai une bonne bouteille de Bas-Armagnac 1970… Une grandissime année… Juste pour vous… Mais me faites pas ce coup la…
Je veux dire… Si vous voulez filler le grand coup de balai ultime… balayez-moi avec… hein ? Promis ? Je ne veux pas survivre…

Parce que ça aussi… Les ceusses qui redoutent la date fatidique et qui veulent s’y préparer… Comme si on parlait d’une simple tempête qu’on laisse passer en se disant que demain il fera beau, que ce sera un autre jour mais que ça peut prendre du temps et qu’il est donc prudent de prendre ses précautions… Fermer les fenêtres, faire des réserves… Aux Courses… Aux Courses… Voyez Auchan, Carrefour ou Casino… Remplissez les Chariots… Les coffres et les congelos… Ça me fait déjà marrer en temps normal mais dans l’attente de la fin du monde… Hein ? Comment que tu t’y prépares toi à la fin du monde mon biquet ? Combien de paquets de Yaourts ? De bouteilles d’Evian ? De Cannettes de Kro ?
Tiens, admettons donc que les révélations de Jean le Cinoque soient réelles… Les 7 trompettes, les 4 cavaliers (les vrais avec cheval noir, gris ou pale et tout le toutim… pas les gonz’ de la Bay Area…)… pis la bête, surtout… LA Bête… Bien cornue et tout…
Admettons aussi que les Mayas, qu’en connaissaient quand même un rayon en astronomie faut bien dire… Que les Mayas donc aient réglé leur Duomètre à Quantième perpétuel sur la même heure que le grand manitou et que le 21 Décembre soit bel et bien la date ad-hoc… Benh entre toi et moi, moi, j’aurais plus tendance à me préparer pour la minute ultime que pour une suite toujours aléatoire…
Je veux dire… En y pensant… Au cas où tout s’achèverait le 21… A quelle heure au fait ? Tu sais toi ?...
Bon… Disons que le grand bordel c’est pour le 21 à 23h59… A tout hasard… Histoire de partir avec la classe et la distinction qui me caractérisent… Déjà… La tenue qui va bien… Costard Alfred Dunhill, Cravate Hermès, Richelieus aux pieds… Chemise Oscar et Swann… Pis ma Jaeger Memovox Polaris 1963, histoire de pas être pris au dépourvu… Bien voir venir l’ultime seconde… Ça c’est bon…
Passer aussi chez le pomadin le matin et l’esthéticienne l’après-midi pour mon soin du visage mensuel…  Faut que je prenne rendez-vous…
Là je serais paré… Reste le programme de la soirée : Mon fauteuil favori, une flambée dans la cheminée… Ca… Ok… Mais après ça se corse…

Parce qu’il faut choisir le contenu du dernier verre… On leur filait quoi aux pauvres types qu’allaient y aller du cigare au temps du temps que la peine de mort avait encore cours chez nous ? Du Cognac je crois… Non ?
Moi, j’hésite grave…
Faire dans le soft, le sucré, laisser parler la part féminine de ma personnalité riche et variée et opter pour un merveilleux Vin de Constance… Ou me rappeler que je suis né quelque part et soutenir le terroir français avec un bon Gewurztraminer Vendanges Tardives ?
Rester dans le jus de la treille mais du côté de la Bourgogne, Corton-Charlemagne ? Ou assurer le coup avec les valeurs sures des coteaux de Condrieu ?
Taper plus haut dans les degrés, dans le plus fort… Un bon Whisky? Un Bas-Armagnac ? Un Vieux Rhum?... Laisser parler l’atavisme : le Génépi Paternel ?
Putain de dilemme… Tu sais quoi ? Je vais me préparer un verre de chaque…

Ensuite… Un bon bouquin… Le Grand Frédéric… Ça, c’est établi, acté, sûr et certain… Mais lequel ? Hein ? Cent Septante Cinq San-Antonio… et tous les autres… Les vieilles dames qui arquent dans la mer, les gones avec les mains sur les hanches… Les clés du pouvoir et tout le reste… Les Cons et Le Standinge… Je ne pourrais jamais choisir… J’en prendrais surement un au pif… Laisser faire le hasard… De toute façon ce sera bien… idéal pour partir en beauté sur un dernier bon mot de tonton Fredo… Une dernière sentence lumineuse sur les cons et leurs porains…
Un peu de musique aussi… et cruel dilemme encore… Faire dans le classique ? Du Dvorak ? Quoi que… Le gars Wagner… Au moment de l’Armageddon… Ça pourrait le faire… Ou bien un petit Jazz… Brubeck…que je te causais ce matin… Ou alors… Claboter pour claboter… Autant le faire dans le bruit et la fureur… Iron Maiden ? Pour faire un clin d’œil à Jean le Givré que je te parlais tantôt… Number of the Beast… Ou du Black Métal Norvégien ? Bien ça… de circonstance en tous cas… A moins que… Du Prog’… S’en aller dans le staccato d’une polyrythmie bien barrée… Ou le Grand Georges ? Faut que je réfléchisse… J’ai encore quelques jours…

Et puis aussi, et puis surtout… Les miens… Tout autour de moi… Ou pas loin… Ma chère et tendre, le fiston, ma fille, mes parents et la famille… Les amis… Les vrais…
Voilà… J’suis prêt… Il peut arriver l’astéroïde de mes belles deux ou quel que soit la solution que mon ami ait trouvée pour nous éradiquer une bonne fois pour toute…
Quoi que…. J’dis ça… Mais maintenant que je suis là, saboulé milord, en train de déguster un délicieux breuvage en lisant du Dard au milieu des personnes que j’aime… J’ai plus envie que ça s’arrête… Je dis stop… Halte à tout ! Peuvent se le carrer dans le proze leur calendrier Mayas les annonciateurs de fin de monde… Je meurs pas… Jamais de la vie… D’ailleurs je peux pas… J’ai du monde.

mardi 27 novembre 2012

Dégustez Gourmandes.


Bonjour ami lecteur, hier soir, alors que je me tenais dans mon fauteuil favori, serein, contemplatif, le regard perdu dans les reflets pourpres de la robe délicate de cet excellent « V » de la maison Vergelegen, je laissais mon esprit vagabonder rêvant à cette lointaine terre d’Afrique où ce nectar avait vu jour.

Je songeais aux hommes d’abord. Ceux qui, depuis Jan van Riebeeck mettent leur savoir-faire, leur patience et leur force au service de la satisfaction de nos papilles. Car dans tout bon vin il y’a du sang, de la sueur et des larmes…

Du sang d’abord… Le sang de la terre dont on déchire le sein pour creuser les sillons… Le sang des hommes encore… Et dans le cas précis de mon verre de Cabernet Sud-Af’, celui des Afrikaners qui tombèrent pour préserver leurs terres de la rapacité Britannique… Te rends-tu comptes ami lecteur que sans le sacrifice de ces hommes, ces terres fertiles n’auraient jamais produit que la bière tiédasse que l’Anglois affectionne…

La sueur ensuite… Beaucoup… Des litres de sueurs… de celle qui perle au front de celui qui plante les pieds dans le sol schisteux, à celle qui coule le long de l’échine tordue du vendangeur… Sueur de l’effort… Même en nos temps d’extrême mécanisation, la vigne a ses exigences que seule la main délicate de l’homme peut satisfaire… La vigne est une maitresse difficile… Une que l’on n’apprivoise qu’en y mettant les formes… De la douceur surtout… Travail d’orfèvre pour ne point abimer les grains délicats… Moment sublime où leur dur et délicat labeur fait des damnés de la terre les demiurges initiant la subtile alchimie…

Et des larmes aussi bien sûr pour compléter le triptyque… Les larmes de Dieu… Oh, attention ami lecteur, pas le dieu vindicatif et jaloux toujours prêt à punir… Pas le dieu que nous vendent les fous qui parlent en son nom pour régenter nos vies… Pas le dieu bête et méchant des autres là… Les mous de la coiffe fanés du slibard… Non… Le mien… Celui que je te cause parfois et qui aime la vie et les libations…
Celui qui pleure souvent devant notre connerie mais qui verse aussi des larmes de joies...
Et ce sont ces perles divines qui abreuvent la treille… Il me l’a dit le bougre lors d’une de nos innombrables conversations… Il m’a conté son bonheur devant les merveilles de sa création quand elle sert une si noble cause que de désaltérer les corps et les âmes…
Ses larmes… La pluie… La pluie nourricière qui gorge les grains… La pluie qui le cède bientôt au soleil pour faire venir les sucres…

Alors je pense à l’homme encore… L’homme toujours… Qui scrute le ciel… Qui palpe ses grappes vermillonnes… Qui goute et qui attend… Tout est aussi affaire de patience… Puis vient donc le temps de la récolte, celui de la pression… Efforts encore… Sueur toujours… et l’attente de nouveaux… Le cycle est immuable qui conduit le breuvage du Cep au tonneau.
Le vin se fait Diogène avant de servir Bacchus… Il dort en son fût de chêne… Se construit une charpente, un corps, des parfums, des effluves… Il attend… Il patiente… Jusqu’à ce que le palais avisé du maitre de chai lui donne son quitus… Lui vote son bon de sortie… Direction la boutanche… Tout seul ou avec d’autres cépages… Divins mélanges… Judicieux assemblages… De l’équilibre avant toutes choses…
Le travail se fait Art.

Et moi de lever mon verre à tous ceux qui l’ont rempli, à ceux qui ont œuvré à sa conception là-bas aux confins des terres Australes.

Tu vois, lecteur adoré, boire est chez moi un profond acte d’amour… D’amour des hommes moi que les esprits chagrins aiment à réputer misanthrope dès que je leur crie contre… C’est plus commode tu comprends… En m’accusant de n’aimer personne ils pensent se dédouaner des raisons pour lesquelles je les honnis parfois… L’amour des hommes donc quand ils œuvrent pour faire la vie meilleure…
Déguster le fruit de leur travail en en savourant chaque goûte est un acte de respect, un acte de reconnaissance, un acte de foi aussi…
Et c’est aussi pour ça, parce que je sais très bien que qui trop embrasse, mal étreint, que je ne bois pas trop souvent… Sans modération qui n’est qu’un pique-assiette, un empêcheur, un contrariant… Mais avec volupté et délice qui savent se faire désirer et son assez avares de leur visite…

Alors qu’ils ne viennent pas me les briser les ceusses que je vois déjà qui froncent le nez… Qui récriminent… Qui me Loi-Evintisent…
De quoi ? Faire l’apologie de l’alcool, ce breuvage du diable qui ravale l’homme au rang de la bête... Ils m’en veulent… Me traitent de pousse au crime… D’irresponsable… D’alcoolique qui n’a même pas la décence de rester anonyme…
Alors je reprends une nouvelle gorgée de ce divin breuvage, je m’humecte la langue pour mieux leur cracher contre… Je remplis ma vessie pour mieux… tu m’as compris…
Mais qu’est-ce qu’ils ont donc ces tristes sires… Ils confondent tout… L’ivresse et la saoulerie… Ils te parlent d’abus et de danger avant de te laisser le loisir de simplement déguster et apprécier… Toujours voir le côté obscur… La sainte trouille… Principe de précaution de mes belles deux…
Qui a bu, boira qu’il disait l’autre con… Comme si un verre en entrainait forcément un autre…
Mais moi, je ne bois jamais d’alcool… Je le déguste… Je ne cherche pas l’ivresse mais le goût, la saveur… La découverte aussi, comme ce vin du bout du monde qui chante sur ma langue… Moi qui fus élevé entre Bourgogne et Côtes du Rhône… Mais qui sait apprécier ce qui nous vient d’ailleurs.

Voilà ami lecteur, je bois la dernière goute… Mon verre et vide… Mon dernier verre jusqu’au prochain qui sera peut-être d’un tout autre cépage ou d’un tout autre fruit, fermenté ou distillé, selon mon humeur… Tiens, le prochain je le lèverai à ta santé mon cher lecteur… Je le goûterai à ton honneur ma chère lectrice… Nous le partagerons virtuellement et j’espère que tu sauras le déguster…