Bonjour ami lecteur, moi tu me connais ? Tu sais donc à quoi t'en tenir en venant ici... Tu sais que je vivais à l’écart de la place publique. Serein,
contemplatif, ténébreux… Certains allaient même jusqu’à me qualifier de
bucolique…
Je refusais en tout cas d’acquitter la rançon de la gloire et de la
reconnaissance de la blogosphère, me contentant de dormir paisiblement sur mon brin de
laurier comme le plus paresseux des Gliridae… Un petit brin tout simple, un brin de rien du
tout diront les plus moqueurs, mais un brin que je cultivais moi-même avec
amour et ténacité.
Mais qu’à cela ne tienne, les gens de bons conseils voulurent me faire
comprendre, qu’à mes lecteurs chéris, j’avais des comptes à rendre. Y compris à toi, lecteur désintéressé... Et que,
sous peine de voir mon blog choir dans un oubli complet, je devais m’engager
plus avant, m’impliquer, abandonner ma réserve naturelle et mettre au grand
jour tous mes petits secrets, exposer tous mes petits travers.
Manquant à la pudeur la plus élémentaire, dois-je donc pour les besoins
de la cause publicitaire, divulguer à quel fâcheux ou constipé du bulbe, je me plais à attribuer la palme de la connerie.
Si je publie des noms, combien de citoyens se disant respectables
passeront illico pour des mous de la coiffe, combien de mal-pensants
me regarderont de travers, combien je recevrais de coups
de revolver ?
A ces penchants coupables ma nature est rétive, souffrant d’une retenue
quasiment maladive je ne fais voir mes écrits délicieux, à personne excepté ma femme et mes lecteurs.
Dois-je pour défrayer la chronique sur la toile, m'en aller rejoindre une quelconque Amicale ? M’encarter dans quelque Parti ? Et le clamer bien
haut, et puis l’écrire ici.
Dois-je arborer
plus ostensiblement un blason, brandir une enseigne, agiter un drapeau, comme ses enfants de salaud portent bien haut l'emblème de leur connerie ?
Un chroniqueur célèbre qui m’avait hébergé un temps sur son espace
personnel, me laissant y faire mes 4 volontés, m’a souvent incité à abandonner
mes apartés subtils et mes circonvolutions elliptiques pour ne parler que sport
en général et football en particulier. Il m’invitait surtout à moduler mon
vocabulaire en fonction des capacités cognitives restreintes de l’homo
supporticus simplex.
Il n’eut de cesse de me montrer l’exemple du billet de blog du plus bas
étage qui soit, arguant de pages lues et autres visiteurs uniques à l’appui de
ses conseils malavisés. Sous prétexte de buzz, sous couleur de réclame, ai-je
le droit de ternir ici l’honneur de ce digne homme en criant sous les toits, et
sur l’air des lampions, « L’Expert Canalien prend ces blogueurs pour des
cons ? »
Le ciel en soit loué, je vis en bonne entente avec quelques compères à la verve chantante, à l’invective preste. Eux les grands pourfendeurs des cons les plus funestes et moi le troubadour aux subtiles bluettes. Je les laisse dire merde aux ramollis de la pensarde, ils me laissent dire amen à leurs moqueries avisées. En accord avec eux, dois-je écrire en ces pages combien je les honnis, combien je les déteste et rejoindre la foule de leurs contempteurs qui n’ont de cesse que de leur chercher des poux dans la tonsure au prétexte qu’ils raillent leurs coupables penchants…
Avec quel bloggeur respectable faudrait-il que je me liasse pour faire venir ici la multitude des blogueurs de tous poils. Faut-il qu’un « expert», une étoile, une star, vienne prendre ici fonction de thuriféraire pour attirer le peuple et les folliculaires. Qui veut bien me prêter sa plume populaire ? Qui voudrait bien faire l’apologie de mon blog et vanter mon style ? Qui voudra bien me laisser faire un peu d’alpinisme sur ses solides épaules de blogueur établi afin de me hisser vers les sommets de la gloire.
Grimperaient-elles plus hauts les divines statistiques de fréquentations, si comme tout un chacun j’affichais ici les phobies les plus sombres, contre les bleus, les noirs, les blancs ou les jaunes, ou contre le grands danger des posters de supposées tapettes susceptibles d’orner la chambre des enfants.
Aurais-je plus de visites si je me déhanchais en marchant au pas de
l’oie et prenais tout à coup des allures martiales pour exprimer bien haut des
idées de races dominantes et de classes inférieures.
Mais je ne sache pas que ça profite à ces drôles d’afficher des idées
aux ras des pâquerettes, ni que cela ne puisse conférer à ma gloire une once de
plus-value, le crime de racisme aujourd’hui est devenu commun.
Après ce tour d’horizon, des milles-et-une recettes qui me vaudraient à
coup sûr les honneurs de la toile, j’aime mieux m’en tenir à ma première façon
et tapoter mon clavier en postant des bouffonneries jubilatoires. Si le public
en veut je les publie Dard-Dard et s’il n’en veut pas je les remets dans mon
tiroir. Refusant toujours de me compromettre en acquittant l’exubérante rançon
de la gloire, sur mon brin de laurier je me rendors comme un loir.
Mes nombreux contempteurs se taperont sur le ventre heureux que je leur offre ici matière à moquerie et eau à leurs moulins mais je leur répondrais simplement : moi j'suis comme ça ! Et je vous emmerde !
Mes nombreux contempteurs se taperont sur le ventre heureux que je leur offre ici matière à moquerie et eau à leurs moulins mais je leur répondrais simplement : moi j'suis comme ça ! Et je vous emmerde !