mardi 16 avril 2013

Champagne pour tout le monde.

Bonjour ami lecteur. Bon, il semblerait que le printemps ait enfin déployé ses ailes. Et ne me les brise pas avec de basses considérations calendaires et autres éphémérides affirmant que ça fait déjà quelques semaines qu’il est là… Moi, tu me connais ? Je ne crois que ce que je vois… Or tu ne vas pas me dire que t’avais l’impression d’être au printemps avant ce week-end… hein ? Bon.
Note que je ne me plains pas de cette arrivée tardive qui m’a permis de profiter des joies du ski jusqu’à tard dans la saison tout en bénéficiant d’un fort enneigement de qualité. Surtout, je ne fais certainement pas partie des neuneus qui craignent l’hiver et le froid qui va avec et se lamentent et désespèrent dans l’attente des beaux jours. Les cons.

Non. Moi j’aime l’hiver. Ce serait presque ma saison préférée pour tout te dire. Pour tout un tas de raisons inattaquables que je t’en livre rapidement quelques-unes histoire que tu comprennes bien ma pensée.
Avec pour commencer le constat que l’hiver est sans nul doute la saison honnie parmi toutes. Celle que le vulgus pecus se complait à dénigrer au prétexte que les jours y sont courts et froids. Rien que pour ça, pour bien les emmerder tous, j’aurais tendance à prendre la défense de cette belle saison et de ses frimas opportuns.
Aussi parce que les rigueurs même du climat de ces trois petits mois présentent l’inégalable avantage de voir les plus pusillanimes d’entre vous ne pas quitter leur nid douillet. Et ça fait autant de mes contemporains dont je n’ai pas à subir les outrages lors de mes pérégrinations. Qu’ils restent chez eux, qu’ils s’y terrent et s’enterrent pour ma plus grande joie et mon plus grand confort.   
Qu’il est doux et bon de voir hiberner les cons… De quoi regretter de ne pas être né sous ses latitudes accueillantes où l’hiver dure six mois.
Après, je te passe le ski dont je te causais plus haut et son corollaire de longues veillées avec famille et amis et quelques excellentes spécialités de nos montagnes et les breuvages qui vont avec…
Oh… J’entends déjà les quelques mécréants qui essayeront de faire remarquer que tous ces plats et boissons peuvent se consommer en toutes saisons. Ce qui est sans doute vrai mais occulte qu’il reste des moments privilégiés pour la consommation de chaque chose. Tiens. Pour te prendre un exemple inverse et bien te faire comprendre mon propos… Un Mojito de bon aloi… Tu préfères le déguster le cul dans la neige avec les roustons qui font bravo ou bien à l’aise blaise dans un transat avec vu sur la mer et quarante à l’ombre… Hum ? Benh là c’est pareil… Fondue et autres tartiflettes ne sont jamais aussi délectables qu’après quelques circonvolutions élégantes dans les neiges virginales et alors que dehors souffle une bise glaciale. T’es pas d’ac ?
Et puis l’hiver… C’est aussi Noel et la Saint-Sylvestre… Les grandes bouffes et les p’tits cadeaux… Que même moi avec le cynisme que tu me connais, je sais apprécier la trêve des confiseurs… Là où tout le monde il est beau et gentil tout plein… Certes cons encore et toujours mais un tantinet moins aigris et rouscailleurs les autruis. C’est toujours ça de pris. Non ?

Après, me fait pas dire ce que je n’ai pas dit. L’hiver s’efface sous les assauts du printemps et je vois poindre les premiers beaux jours avec délectation. J’aime le printemps aussi. C’est cool. Mon jardin refleurit et se pare de mille tons irisés qui me font oublier les fortunes que me demande mon jardinier pour l’entretenir.
J’aime les matins printaniers surtout. Quand tu t’éveilles au chant mélodieux des oiseaux qui saluent le jour d’un chant joyeux avant même que la sonnerie de ton réveil ne te sorte des bras de Morphée… C’est quand même plus agréable non ? Surtout si t’as un radio réveil et que ce sont les conneries dégoisées par un obscur journaleux ou le dernier hit merdique à la mode qui te tirent du plum’. Quoi de plus merveilleux que le doux ramage des tétrapodes au petit morning… A part un bon riff Meshugesque ou toute autre sonorité métallique de bon aloi.
Et puis, comme nous le fait justement remarquer l’ami Stravinski : au Printemps, une grande joie règne sur la terre et les hommes se livrent à la danse. Les adolescentes mènent des jeux mythiques et cherchent la grande voie… Bref… On rit on s’amuse… Bacchanale dans les riantes campagnes qui verdoient de plus belle.
Et puis au printemps, entre les fêtes Pascales et le joli mois de mai, c’est la valse des jours fériés. Qu’ils soient païens ou bêtement religieux, ils se suivent et se bousculent pour mieux nous inviter à une plaisante oisiveté.
Bon… Y’a bien les jours qui grandissent et s’allongent alors que moi je préfère la nuit mais ce n’est que partie remise car arrive l’été et son solstice qui voient ensuite les jours décroitre de nouveau.

L’été. C’est pas mal non plus l’été. Déjà. Le Solstice que je te causais. Le songe diffus de cette nuit où brulent les feux de la Saint-Jean. Basse récup’ catho des fêtes païennes traditionnelles. Moi, le solstice je le fête en Bretagne. Clisson me voilà. Trois jours à célébrer le culte du Dieu Métal et de ses dérivés. T’as vu l’affiche de cette année… On va se régaler.
L’été, ce sont aussi les vacances. Quelques semaines en famille pour découvrir l’ailleurs. C’est toujours agréable. A pied, en voiture, en avion, en bateau, tu peux t’en aller de par le vaste monde. Rencontrer des gens et partager leurs us et leurs coutumes.
Surtout, en été, il fait chaud. La bonne excuse pour paresser peinard sans qu’on te traite de traine savate. Chaise longue, cocktails judicieusement dosés et d’excellents bouquins bien sûr.
Moi, tu me connais ? Jamais sans un livre ! En toute saison et par tout temps… Mais soyons honnête. C’est quand même en été que je m’adonne à cette noble passion avec le plus de ferveur. Parce que quoi faire d’autre ? Trop chaud je te dis. Trop chaud pour s’agiter en tous sens.
Surtout… Je n’aime pas l’eau ! La mer, l’océan… Ca va pour naviguer dessus et prendre le large… Direction l’horizon que mon ami pirate te décrivait tantôt avec tout son talent. A la rigueur. Ca j’veux bien. Toutes voiles dehors. Sombre héro de l’amer comme le chantait l’ami Bertrand. Cheveux au vent dans les haubans… Partir ailleurs !
La plage à la rigueur… Mais déserte hein ? Isolée. La crique inaccessible au commun des mortels. A ceux qui me cassent déjà assez les burnes le reste de l’année pour que j’aille encore m’allonger sur le sable avec eux.  Mais bon… Une petite plage de rien du tout juste pour moi et les miens… Construire des châteaux de sable pour ma Princesse et son p’tit pote à venir. Et s’assoir sur le sable, cinq minutes avec eux et regarder la mer tant qu’y en a une.
Regarder cette mer qu’on voit danser le long des Golfes que tu sais…
Mais se baigner dedans ? Pas pour moi. Pas avec tout ce que ces cons déversent impunément dans nos mers en péril. Parce que les reflets d’argents bien poétiques et tout… T’es certain que ce n’est pas du Mercure ? Ou tout autre métal lourd bien nocif… Parce que bon… Le Métal… Dans les esgourdes… C’est le top… Mais en ingurgiter en masse chaque fois que tu bois la tasse… Faut pas t’étonner après qu’il te pousse des trucs et des machins au plus mauvais endroit…
Alors, non merci… Pas de ça Lisette. Le Ytse… Il reste sur le sable et à pieds secs à ramasser coquillages et crustacés qui déplorent la fin de l’été.
Parce que viens le jour où faut plier bagage et s’en retourner plein de ce que tu sais dans ton petit village…

Et voilà l’automne qui se pointe. La belle saison que voilà qui pare d’or et de pourpre les coteaux du Léman. Déjà, l’Automne, c’est la saison des vendanges et des récoltes. L’instant magique qui préfigure tes ripailles futures. Les prémices du cycle merveilleux qui amènera le sang de la terre jusque sur ta table, en ton verre que tu dégusteras en pensant à celui qui a cueilli le fruit à la sueur de son front, l’a foulé au pied, l’a mis en barrique et l’a amoureusement veillé afin qu’il laisse s’exhaler toute la force de son parfum.
L’automne c’est ce petit crachin vivifiant qui arrose un jour gris comme un linceul. C’est une saison de nostalgie et de tristesse. Quand les eaux du ciel se déversent à grands flots sur nos villes et leurs faubourgs brumeux. Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle sur les esprits gémissants de mes tellement porains, de mes tellement poraines.
Et j’aime cette ambiance crépusculaire et spectrale qui fait de nos paysages des décors à la Tim Burton ou à la Murnau. Et moi, à ma fenêtre, qui regarde la pluie dessiner des arabesques fantasques sur les carreaux, je pense à Shelley et à son Prométhée moderne qu’elle composa entre Coppet et Cologny par cette année sans été de sinistre mémoire.
L’automne à la flamboyance du gothique et je l’aime pour cela.

Et arrive l’hiver. Un an est passé qui emporte avec lui les joies et les peines. Les premiers flocons poudroient sur Alpes et Juras. Et moi, près de mon âtre, à contempler les reflets des flammes à travers de ma coupe de Cristal Roederer. Je souris à ce nouveau cycle qui commence et me verra apprécier chacune des saisons qu’il nous offrira et je lève mon verre à la santé du grand ordonnateur. De l’horloger savant qui créa cette belle mécanique. A la sienne et champagne pour tout le monde.